Recherche

Lignes de recherche

LES LIGNES DE RECHERCHE, CONSACRÉES A LA RECHERCHE THÉORIQUE ET EXPÉRIMENTALE EN ART, PRENNENT UNE DIVERSITÉ DE FORMES.

Les lignes de recherche proposées en priorité aux étudiant·e·s de quatrième et cinquième années sont des espaces de travail qui prennent différentes formes et mobilisent de nombreux partenaires institutionnels et artistes chercheur·euse·s nationaux·ales et internationaux·ales sur une durée variable, souvent de plusieurs années. Les enjeux théoriques et pluridisciplinaires engagés dans les lignes de recherche nourrissent d’une part les mémoires que les étudiant·e·s soutiennent pour le DNSEP et d’autre part leurs productions artistiques, ainsi que divers projets qui font l’objet de restitution sous des formes plurielles (colloques, éditions, expositions, festivals, etc.). Actuellement plusieurs lignes de recherche sont développées sous la direction d’artistes et théoricien·ne·s enseignant·e·s à l’école en collaboration avec de nombreux partenaires :

ART BY TRANSLATION

Renaud Auguste-Dormeuil
Dans le cadre du post-diplôme Art By Translation, avec Sebastien Pluot et Maud Jacquin.
En partenariat avec l’École supérieure d’art et de design TALM-Angers

Art by Translation est un programme de recherche et d’expositions dirigé par Maud Jacquin et Sébastien Pluot et porté par l’École Nationale Supérieure d’Arts de Paris-Cergy et l’École supérieure d’art et de design TALM-Angers. Il est soutenu par le Ministère de la Culture et collabore avec des institutions artistiques et universitaires en France et à l’étranger. Organisé en sessions dédiées à un thème de recherche spécifique, ce programme itinérant développe des projets artistiques et curatoriaux, des conférences et des publications en collaborations avec des musées, des universités et des écoles d’arts en Europe et en Amérique du Nord. Art by Translation est également un post-diplôme auquel participent quatre artistes internationaux.ales par an. Ces artistes, qui sont sélectionné.e.s suite à un appel à candidatures, contribuent à tous les aspects du programme dans les différents contextes internationaux notamment en produisant de nouvelles œuvres. Cette session 2022-2023 sera consacrée à la traduction et la publication des trois axes de la recherche que Art by Translation a développés depuis 2016 : The House of Dust by Alison Knowles ; Historisations, Les temps entremêlés ; Affaires Etrangères, Diplomaties et traductions. Ces trois ouvrages vont rassembler les recherches qu’ABT a déployé avec les artistes et commissaires fellows du post Master ainsi qu’avec les artistes et les chercheur-euse-s invité-e-s tout au long du programme. Le processus d’élaboration de ces publications prendra la forme d’une exposition performative (sons, chorégraphies, textes, installations, sculptures…).

GESTES D’ART, ARCHIVES ET CULTURES VÉGÉTALES, PAYSAGES RÉINVENTÉS

Hassan Darsi, Laure Huertas Millán, Nida Sinnokrot
Avec la Graduate School Humanités, création et patrimoine, dans le cadre du Master 2 de recherche par le projet, mention art.
En partenariat avec le MIT Program in Art, Culture and Technology (Massachusetts Institute of Technology) &  Sakiya Art/Science/Agriculture Initiative (Palestine) ; La Source du Lion, structure artistique et agricole (Casablanca) ; le Jardin botanique de Méry-sur-Oise.

Depuis les années 1990, l’importance croissante de l’histoire environnementale au sein des humanités se conjugue avec un processus d’internationalisation des terrains de recherche au-delà d’une wilderness toute étasunienne. Les études postcoloniales et décoloniales contaminent les problématiques environnementales pour ouvrir la réflexion sur la manière dont la colonisation affecte et détruit les écosystèmes, les paysages, la végétation, la géologie, avec lesquels les êtres humains sont en constante interaction.  Non seulement les paysages, les végétations, les matières, les géographies, sont socialement construits, mais ils façonnent les manières de faire, les gestes, les manières de raconter, de rêver. L’anthropologue et cow-boy étasunien Keith Basso a dans ce sens montré, à partir de ses enquêtes auprès des Apaches occidentaux, qu’un site pouvait être une parcelle de temps, d’expérience et de mémoire. Et que tous les lieux avaient une histoire et pouvaient devenir matière à récit. De même, si les humanités environnementales insistent sur la portée éthique et militante du savoir et conçoivent leurs travaux comme autant de leviers pour agir sur le présent, l’art contemporain, qui depuis les avant-gardes se conçoit dans une tension constante entre représentation et action, conjugue l’engagement aux puissances de l’imaginaire, à un faire poïétique et à une poésie qui est passage à l’action. Les trois axes mobilisés autour de la ligne de recherche « Gestes d’art – cultures et archives végétales, paysages réinventés » conjuguent, autour de l’exigence méthodologique de la recherche en art par le projet, une attention aux gestes artistiques et à leur genèse, aux paysages et à leur histoire, aux jardins, aux interactions mondiales qui cristallisent dans des lieux et des organismes situés, à l’histoire des matériaux eux-mêmes et à leur mémoire ; ou pour le dire avec les mots de l’écrivaine et anthropologue Nastassja Martin : « l’actualité des métamorphoses éco-humaines globales se donne à lire dans le ventre d’un caribou tué aux pieds de son chasseur sur les hautes plateaux de l’Alaska »… Ou dans le lichen déposé sur une pierre à Ramallah…

JAPONOLOGIES

Corinne Le Neün
Avec la participation de Bruno Fernandes.

En partenariat avec la Cinémathèque française, le fonds Alive, le Centre National des Arts Plastiques, la Villa Kujoyama, Institut français au Japon dirigée par Charlotte Ischii-Fouchet ; Héritages : Culture/s, Patrimoine/s, Création/s (UMR 9022), unité mixte de recherche portée par CY Cergy Paris Université, le Centre National de la Recherche Scientifique et le Ministère de la Culture.

Initialement fondé avec les chercheurs de l’Inalco (Le professeur Michael Lucken) le séminaire a pour ambition de doter les étudiant.e.s des outils de l’analyse critique en leur offrant les connaissances nécessaires à la compréhension de la création au Japon et cela en vue de mieux appréhender une culture qui exerce une puissante fascination sur toute une jeune génération. Lors de cette nouvelle saison de Japonologies, le travail d’analyse de divers registres d’images se poursuivra grâce aux apports historiques, culturels et linguistiques mis en partage par les intervenant.e.s (chercheur.euse.s, étudiant.e.s, artistes et enseignant.e.s) avec comme point central la généalogie des images et les questions de l’influence des modèles esthétiques fournis par les arts japonais et les constants allers retours entre les différentes cultures.

LES ÉCRITS D’ARTISTES EN MOUVEMENT

Carole Boulbès

Les écrits d’artistes se situent à la croisée de plusieurs disciplines : littérature, arts plastiques, histoire de l’art, sociologie de l’art, psychanalyse, esthétique. C’est ce mélange particulier qui en fait une production hors-norme, difficile à saisir, mais riche d’enseignements. De Marcel Duchamp à La Ribot, le corpus de textes à découvrir se déploie presque à l’infini… Les écrits des artistes en disent long sur leur pratique ou bien ils n’en disent rien. Certain-e-s donnent des conférences, des interviews, d’autres rédigent des notes dans le plus grand secret. À l’auto-analyse, certain-e-s préfèrent des formules brèves comme les poèmes, les slogans politiques ou les aphorismes. De plus en plus, les écrits d’artistes deviennent objets d’exposition ou synopsis de films. Cette année, on portera l’accent sur les manifestes des performer-euse-s, sur les « partitions » des chorégraphes et les expressions revendicatives « en mouvement ». Ce séminaire vise à lire ensemble, réfléchir, et à étudier un corpus d’écrits d’artistes proposés par les participant-e-s. On cherchera surtout à débattre d’un certain nombre de notions liées à la création et à la recherche (liens entre la théorie et la pratique, modes opératoires, valorisation du travail) dans un esprit critique et constructif.

LES TOURMENTS DU NOM*

Corinne Le Neün
En collaboration avec Christian Merlhiot.

Avec la participation de Emmanuel Lozerand, Charlotte Marchina, SMITH, Baptiste Coulmont.

À partir du film de Christian Merlhiot intitulé Je reviendrai comme un enfant, qui interroge la transmission des noms dans une communauté Inuit aujourd’hui, nous questionnerons, au fil de ce séminaire, les formes et les rituels de dénominations contemporains, en relation avec les identités qu’ils recouvrent. Depuis les noms reçus à la naissance, les noms d’emprunt, les noms d’usage, les noms choisis, les pseudonymes, les hétéronymes et autres alias où se multiplient nos activités sociétales et nos identités de genre, jusqu’à la pratique des noms posthumes. Dans cette exploration, nous accueillerons des communications sur les us et coutumes européen, inuit, mongol et japonais et mettrons en partage des textes d’anthropologues, d’historien-ne-s de l’art, de juristes, d’écrivain-e-s et des œuvres en lien avec ce vaste questionnement identitaire.

* Les tourments du nom est le titre d’un ouvrage d’Emmanuel Lozzerand publié par la Maison franco-japonaise en 1994.

THE NIGHT OF ASSASSINS (À LA RECHERCHE DES RALLIZES DÉNUDÉS)

Gallien Déjean
En collaboration avec l’atelier édition

Avec la participation de Lionel Fernandez et Eric Baudelaire

Proches de l’avant-garde théâtrale japonaise des années 1960, les Rallizes Dénudés deviennent en 1967 un groupe de rock psychédélique radical. Très politisés, proches de l’Armée rouge japonaise et des mouvements étudiants, certains de ses membres sont suspectés de participer à des actions armées et rentrent dans la clandestinité. Ils ne sortiront aucun album officiel, la plupart des enregistrements connus – généralement, de longues compositions bruitistes jouées en live –, constituant une discographie erratique composée essentiellement de disques pirates (bootlegs) ou de compilations tardives. Pourtant, les Rallizes Dénudés sont cultes. Ils rassemblent autour de leur musique une large communauté de fans, de diggers et de bootlegers, et sont même considérés comme l’une des sources majeures de la musique noise (en particulier, de ce qu’on appelle la « japanoise »). L’histoire des Rallizes est un patchwork de rumeurs, d’approximations, de fantasmes et de sous-entendus entourant les membres du groupe d’une aura mystérieuse – à commencer par Takashi Mizutani, le leader charismatique disparu de la circulation il y a quelques années. Est-il mort ? D’aucuns prétendent qu’il habite à Paris, d’autres à Bruxelles…

A la croisée d’une certaine histoire des avant-gardes, du rock et de l’engagement politique radical, cette ligne de recherche conçue en collaboration avec Lionel Catelan envisage la constitution et la pérennité d’un mythe culturel comme objet d’étude. Sous la forme d’une enquête documentaire reconstituant l’histoire évanescente et rapiécée du groupe à partir de ses traces, de ses fragments ou de ses effacements, ce projet s’envisage comme une anarchive – selon l’expression de Jacques Derrida –, c’est à dire comme la constitution d’une méthodologie de recherche centripète qui rayonne autour de son objet pour tenter d’en cartographier l’absence.

L’année 2019-2020 a été consacrée à la mise en place du projet (définition du sujet, documentation, séances d’écoute, repérages des interlocuteur-rice-s, etc.). Au cours de l’année 2020-2021, nous sommes entrés en contact avec des membres de la communauté des fans des Rallizes, active sur les réseaux sociaux, et nous avons commencé la réalisation du projet de recherche qui prendra la forme d’un ouvrage collectif rassemblant les traces recueillies au cours de cette recherche (documents historiques, ressources numériques, témoignages, etc.). En parallèle, nous avons continué le séminaire entamé autour de notre sujet (histoire des musiques noise et expérimentale, l’action directe et la contre-culture au Japon, workshop avec Lionel Fernandez, etc.). Au premier semestre de l’année 2022-2023, nous finaliserons l’ouvrage et l’imprimerons afin de le diffuser. Puis nous clôturerons le projet avec un workshop d’Eric Baudelaire.

ZG MAGAZINE

François Aubart

Fondée à Londres en 1980 par la critique d’art Rosetta Brooks, ZG Magazine est une revue d’art ouverte à bien d’autres questions que les seules préoccupations esthétiques. Dès sa création, elle s’oppose à la spécialisation qui fait de chaque domaine des « ghetto culturels » et revendique un décroisement qui lui permet de faire penser l’art, la musique, le cinéma et le spectacle depuis un point de vue social et politique. Immergée dans les milieux alternatifs, elle consacre des articles de fond au mouvement punk, au sadomasochisme, aux politiques radicales, à l’autonomisme italien ou encore à la pensée de Felix Guattari. Au bout de quelques numéros, ZG Magazine s’installe à New York où elle chronique l’apparition d’une scène artistique post-conceptuelle, de la Pictures Generation, du mouvement no wave et du graffiti avant de rendre également compte des années Reagan et de l’apparition d’une politique devenue spectacle. ZG Magazine, dont les initiales sont celles de Zeitgeist, ce terme allemand qui désigne « l’air du temps », aura au fil de ses pages et en presque une décennie d’existence rendu compte des espoirs et des défaites d’une génération ayant cherché à bouleverser l’ordre de la pensée, de la politique et de l’art des années 1980.