Etudier à l'ENSAPC

ART ET REPRODUCTION

François Aubart

Toutes les technologies modifient le monde social et le quotidien. Celles appliquées à la reproduction et à la diffusion d’images impactent la façon dont on conçoit une représentation et l’information qu’elle véhicule. De l’invention de la photographie au développement des outils numériques, le XXE siècle et le XXIE sont cadencés par l’apparition d’outils de production d’images qui ont eu de puissantes répercussions sur les pratiques artistiques. Les appareils technologiques accompagnent ainsi, de près ou de loin, l’émergence de nouvelles considérations sur des notions comme l’unicité ou la matérialité des images, la différence de régime entre culture de masse et culture noble, qui bousculent la façon de concevoir ce qui fait œuvre. C’est en observant cette réciprocité entre inventions technologiques et artistiques que ce cours aborde l’histoire de l’art moderne et contemporain.

« BECOME THE MEDIA » – HISTOIRES DE L’EXPOSITION

Gallien Dejean
Invité·es : Sandra Alvaro de Toledo, Centre Simone de Beauvoir, + un·e invité·e mystère

Dans la tradition moderniste, chaque médium – à commencer par la peinture – se doit d’être autoréférentiel afin d’atteindre son essence. Dans ce contexte, le médium curatorial, qui s’incarne dans l’exposition, est impur car il est composite et ses supports sont multiples. C’est donc pour garantir la pureté de ses expositions que le modernisme a créé l’environnement aseptisé du «white cube ». Contrairement à cette conception, la théorie des médias permet d’envisager la plate-forme curatoriale comme le médium absolu puisque son objet intrinsèque est la diffusion. Dans ce cours, nous étudierons cette fonction de diffusion en évoquant, d’une part, le rôle du ou de la curatrice à travers l’analyse critique de son statut. D’autre part, nous observerons à travers un certain nombre d’exemples historiques et contemporains comment les artistes se sont saisis de cette fonction curatoriale dans son sens le plus large (expositions, magazines, maisons d’édition, librairies, chaînes de télévision, etc.), afin de s’approprier et de réinventer des prérogatives essentielles (diffusion, théorie, économie) qui leur ont souvent été confisquées.

CHAMPS DE FORCE

Luc Lang


« Champ de forces » est un terme utilisé par Deleuze que je reprends à mon compte pour évoquer la rencontre par aimantation ou opposition de tous les médiums (littérature, philosophie, cinéma, arts plastiques, vidéo, performances) concernant une problématique définie, chacun des médiums y répondant à sa façon, avec sa poétique, avec sa technique, ses outils, ses points de vue liés justement à ses techniques et ses process. De quoi créer un champ de forces, un champ d’aimantation, où tous les médiums dialoguent et polémiquent entre eux sur un même sujet. Nous avons déjà eu une réflexion sur qu’est-ce que l’image et sa nature selon le médium qui la produit ? En 2020 c’était une réflexion sur le genre humain, en 2021 c’était une réflexion sur la nature de l’objet d’art et la nature du travail de l’artiste en regard des objets usuels et de l’organisation du travail telle qu’elle est proposée dans l’entreprise contemporaine. En 2023, au regard de la réflexion essentielle de Gunther Anders sur l’obsolescence de l’humain (sur la destruction de la vie à l’époque de la troisième révolution industrielle), et de celle de Byung-Chul Han sur la fin des choses, nous travaillerons sur l’objet, sa désubstantialisation, sa disparition dans notre monde contemporain et quelles sont justement les propositions artistiques et quelles sont les pragmatiques induites par les œuvres que proposent certain·es artistes de la seconde moitié du XXE siècle et du début du XXIE siècle pour résister à cette destruction ?

En 2024, nous reprenons la problématique autour de l’objet, de sa dématérialisation et de sa disparition progressive, au profit de l’accès à des fonctions et des applications. Mais en y ajoutant l’idée de corps, pas seulement dans l’inanimé des matériaux, mais dans le vivant, notamment du corps humain, dans une oscillation entre le corps-objet et l’objet-corps. De la même façon qu’un sujet puisse être un objet, le corps peut aussi en être un. Pas seulement l’objet du désir, mais plutôt l’objet-corps comme cible, que l’on nourrit, que l’on exploite, que l’on façonne, que l’on aliène, selon des modalités et des idéologies toujours plus subtiles et fines, l’horizon modélisant étant de devenir un corps-machine dans lequel l’espèce humaine pourrait disparaître.

FACE A FACE

Luc Lang

Trop souvent, les étudiant·es ont un rapport abstrait aux arts par le biais des images électriques de leurs écrans. Il s’agit donc de se confronter à la réalité physique unique des œuvres présentées à Beaubourg. C’est bien d’un face à face, à l’échelle réelle qu’il s’agit, et de développer une attention frontale et particulière à l’œuvre, et non de venir vérifier au musée que l’œuvre correspond à sa photo comme si c’était l’image électrique l’original…

Chaque étudiant·e doit, devant une ou plusieurs œuvres qu’iel choisit, la présenter à l’ensemble du groupe, construire sa critique de l’œuvre. Il-elle peut choisir des œuvres parce qu’il-elle les trouve importantes, intéressantes, puissantes, ou encore parce qu’il-elle les trouve faibles et sans intérêt. L’objectif étant de construire un point de vue personnel argumenté et sensible sur l’œuvre.

IMAGINAIRES POLITIQUES

Marielle Chabal
En partenariat avec le DOC

Notre rapport au monde est influencé par les récits projetés dans nos réalités, des récits sur l’histoire de l’humanité qui performent nos existences. Les récits − tous les récits −, tant dans leurs fabulations, leurs vérités que leurs structures sont de puissantes machines de décentrement. Ils peuvent interroger, révéler ou inventer d’autres possibilités d’existence et ce faisant, ces récits participent à construire les manières dont nous habitons le monde. Puisque la réalité est une construction, la fiction n’est en rien fictive, elle trace des chemins à emprunter et dessine les possibles de nos avenirs communs. Les récits d’anticipation − sous des formes utopiques, complotistes ou catastrophistes − sont désormais le champ de négociation de notre lecture du monde et dans un contexte social et politique où ni la tabula rasa, ni la fuite en avant ne sont envisageable, activer des possibles est probablement le meilleur moyen de modeler et de réagencer la réalité. La fiction spéculative représente un outil qui peut se révéler très puissant pour transformer le réel, à condition qu’elle ne soit pas créée de toute pièces, ni hors-sol, mais qu’elle permette de mobiliser des imaginaires de manière collective. Il est urgent de ne plus réduire la fiction d’anticipation aux visions dystopiques et de forger des images fortes et positives pour rêver des utopies qui proposent des désirs sociétaux, des rapports humains, des résistances, des ailleurs émancipés, multiples, égalitaires. Ce séminaire recouvre des dimensions à la fois formelles et politiques. Nous nous demanderont de quels récits nous avons besoin aujourd’hui pour infuser notre époque et comment les raconter. Nous inventerons tout ce que nous pouvons et revendiquerons la nécessité de mettre en œuvre des récits transformateurs qui évoquent et possibilisent des changements souhaitables, des futurs enviables que nous formaliserons pour les rendre envisageables.

MANIFESTES LES ÉCRITS D’ARTISTES ?

Carole Boulbès

Les écrits d’artistes se situent à la croisée de plusieurs disciplines: littérature, arts plastiques, histoire de l’art, sociologie de l’art, psychanalyse, esthétique. C’est ce mélange particulier qui en fait une production hors-norme, difficile à saisir, mais riche d’enseignement. De Raoul Hausmann à Andrea Fraser, en passant par Asger Jorn, et Krzysztof Wodiczko, le corpus de textes à découvrir se déploie presque à l’infini… Les écrits des artistes en disent long sur leur pratique ou bien ils n’en disent rien. Certains donnent des conférences, des interviews, d’autres rédigent des notes dans le plus grand secret. À l’auto-analyse, certains préfèrent des formules brèves comme les poèmes, les slogans politiques ou les aphorismes. De plus en plus, les écrits d’artistes deviennent objets d’exposition ou synopsis de films. Cette année, on mettra l’accent sur les manifestes artistiques du XXE siècle, les expressions revendicatives et les écrits d’artistes plus récents qui traitent plus spécifiquement d’économie.

ONE + ONE (ÉLOGE DU PARTAGE, DE L’ÉCHANGE ET DE LA TRANSMISSION)

Boris Achour

Ce cours se joue à deux enseignant·es et plusieurs étudiant·es. Bien que proposé par Boris Achour, ce jeu peut se jouer sans lui mais être mené par deux autres enseignant·es. La durée du cours est comprise entre deux et trois heures, voire plus selon l’énergie et l’engagement des participant·es.

L’enseignant·e A présente aux étudiant·es une œuvre qu’il ou elle aime tout particulièrement (film, texte, son, œuvre plastique…) par une courte introduction destinée à la contextualiser. Puis, l’enseignant·e B fait de même avec une autre œuvre de son choix. Les deux enseignant·es ne s’étant pas informé·es au préalable des œuvres choisies, chacun·e découvre celle de l’autre en même temps que les étudiant·es. Prenant pour point de départ les œuvres présent·es, leurs contextes de créations, leurs auteur·ices ou tout autre paramètre jugé pertinent, les deux enseignant·es engagent une discussion mêlant analyses, commentaires, critiques, références, digressions, divagations et coq-à-l’âne. La participation des étudiant·es est possible mais pas obligatoire.

PROXIMITÉ, IDENTITÉ, DIFFÉRENCE (POUR PRATIQUER LE MOUVEMENT ET SORTIR)

Claudia Triozzi

Une collaboration avec Aware tous les vendredis en semaine A est programmée pour le semestre 2. Nous allons nous inspirer et partager des lectures d’artistes engagé·es dans la performance et l’activisme féministe et du genre. Ré-interpréter, ré-activer, re-penser UNE RÉFLEXION entre femme et art en relevant ces implications historiques, politiques et de genre. Ainsi réactiver les archives pour révéler les différents moments qui ont traversé l’émancipation des femmes par la performance, l’écriture et les arts visuel. Repenser encore l’insertion des femmes artistes dans les dynamiques institutionnelles. Repenser le proche, les « microstories », le quotidien, l’intime pour réaffirmer ce qui fait corps : PROXIMITÉ, IDENTITÉ, DIFFÉRENCE. Pour se faire, nous allons traverser à nouveau des autobiographies d’artistes femmes et choisir différentes relectures des œuvres. Nous serons présentes dans les lieux de Aware pour partager des ateliers de travail in situ. Une présentation-restitution du travail élaboré dans l’année sera prévue au courant du mois de mai. Il s’agira d’identifier et de choisir les raisons spécifiques qui nous amènent à nous intéresser à une artiste pour pouvoir les nommer et les faire siennes en les convoquant à plusieurs voix. Des invitations d’artistes et théoriciennes seront proposées.

SÉMINAIRE DE MÉTHODOLOGIE

François Aubart, Gallien Déjean, Nadine Le Rigoleur, Laure Limongi

Le séminaire de méthodologie s’adresse aux étudiant·es de 3E année afin d’amorcer, de prolonger et d’enrichir une réflexion transversale aux médiums et outils privilégiés de chacun·e portant sur les enjeux de méthodes dans la perspective du mémoire à réaliser en 4E année. Plutôt que de comprendre la méthodologie comme un ensemble de règles à appliquer en tout temps et en tous lieux, il s’agira de la saisir comme un ensemble d’outils à inventer, critiquer et / ou détourner, au gré des circonstances de production et de pensée, de même qu’il s’agira de comprendre la méthode comme la visée d’un travail artistique et / ou de recherche elle-même.

 

SÉMINAIRE DE PROFESSIONNALISATION

Camille Kingué

Le séminaire de professionnalisation a pour but de donner un aperçu des différent·es acteurs·rices présent·es dans le champ de l’art contemporain, qu’il s’agisse de galleristes, critiques d’art ou commissaires d’exposition. Le séminaire de professionnalisation permettra de les mettre en lien avec les étudiant·es de l’école. Ces dernier·es pourront comprendre l’environnement dans lequel chacun·e de ces acteurs·rices travaillent.

SPATIAL POLITICS AND STORYTELLING: CONTEMPORARY ART NARRATIVES IN POLITICS, HISTORY AND ARCHITECTURE

Folakunle Oshun
Partenaires : Lagos Biennal, Chicago Art Institute

With its primary focus on the political and historical implications of monumental architecture in the built environment, this course is designed to give students insights into engaging the urban landscape through contemporary art practice. It will focus on the interactions between the art object and potential exhibition and intervention locations within the urban landscape and particular monumental architecture in diverse geographies. Taking its premise from the researcher’s thesis, which focuses on repurposing post-independence architectural monuments across West Africa, the course will follow a workshop format with site visits, guest lectures, and group discussions. Students are encouraged to experiment with various materials, media, and formats in speculative, physical, and non-physical contemplation regarding what interventions and interactions could be made with the selected locations. This module will centre on juxtaposing art with architectural forms, the politics behind their commissioning, and the ideologies behind their design.

THE PHENOMENON OF BIENNIALES/TRIENNIALS

ChươngĐài Võ

This course looks at the phenomenon of biennales and triennials: why they exist and their role in defining contemporary art. We will start with an introduction of the history of the biennale/triennial by looking at the earliest model, the Venice Biennale, and then examine different models that have arisen around the world. Though Magiciens de la Terre was not a biennale, it was an influential international exhibition on the scale of a biennale and therefore will be one of the models we will look at. Others include the Third Havana Biennial in 1989, and the Shanghai Biennale in 2000. We also will consider the differences between biennales/ triennials and festivals, by looking at Chiang Mai Social Installation in 1990s Thailand. In addition to reading assignments, we will visit a few museums and cultural sites relevant to our discussions.

THÉORIE ESTHÉTIQUE ET CONSÉQUENCES PRATIQUES – ATELIER DE LECTURE

Geoffroy de Lagasnerie

Ce cours prendra la forme d’un atelier collectif de lectures et de discussions de textes de théorie de l’art et des images. Chaque séance consistera en une présentation d’un texte par un ou plusieurs étudiants, puis nous en discuterons les enjeux théoriques, politiques et historiques ainsi que les conséquences que vous pouvez en tirer pour votre pratique. Ce cours demande donc de l’assiduité et une volonté de participer à une discussion collective.

TRANSFORMER LE MONDE, CHANGER LA VIE

Carole Boulbès
Une ou deux séances avec Alejandra Riera
Invité·es : Stéphanie Jamet, historienne de l’art, Julien Tibéri, artiste 

« Transformer le monde, a dit Marx ; changer la vie, a dit Rimbaud : ces deux mots d’ordre pour nous n’en font qu’un ».
André Breton, Position politique du surréalisme, Discours au Congrès des
écrivains, 1935.

Transformer le monde et changer la vie, ces impératifs sont au coeur du catalogue de l’exposition sur le Surréalisme qui a ouvert à Paris en septembre 2024. La poésie de Rimbaud est mise en résonance avec les thèmes du monstre, de la forêt, de la nuit. L’engagement politique est abordé à travers l’anticolonialisme, « le Black
surrealism » et une position critique envers le consumérisme moderne.
Pourquoi 2024 ? On commémorera le centième anniversaire du Premier Manifeste d’André Breton, la parution d’Une Vague de rêves de Louis Aragon et le lancement de la revue La Révolution surréaliste. Dans un cours dialogué, en présence de l’historienne de l’art Stéphanie Jamet, avec des artistes invité·es, nous proposons quelques questions à débattre ensemble : qu’en est-il de la poésie aujourd’hui ? L’art peut-il être engagé ? Les expositions peuvent-elles l’être ? Les positions politiques du surréalisme ont-elles encore une incidence ? Quelle était la place des femmes dans ce mouvement ? Qu’en est-il de la révolution surréaliste à l’échelle du monde ?